Le Podcast des Légendes retrace le parcours gagnant de la première Coupe du Monde gagnée par les Bleus, 20 ans avant 1978...
Après les deux éditions précédentes manquées par l'équipe de France, que ce soit au Mexique en 1970 ou en Allemagne quatre ans plus tard, les Bleus s'étaient qualifiés difficilement pour la coupe du monde 1978 en Argentine après d'âpres rencontres disputées dont un match couperet au Parc des Princes remporté brillamment face à la Bulgarie.
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Après l'euphorie du succès vinrent inévitablement les questionnements franco-français, les journalistes et autres observateurs avisés se demandaient si l'objectif était atteint ou si ce n'était qu'une étape, un palier franchi pour une génération prometteuse pouvant avoir des ambitions légitimes. Dès l'annonce de la liste des 20 joueurs retenus quelques jours plus tard, Hidalgo avait surpris tout son monde en sélectionnant logiquement 3 gardiens (Bertrand-Demanes, Baratelli, Dropsy), seulement 5 défenseurs (Battiston, Janvion, Lopez, Trésor, Bossis), 7 milieux de terrain ! (Michel, Bathenay, Giresse, Guillou, Papi, Platini, Sahnoun) et 5 attaquants (Six, Lacombe, Rocheteau, Rouyer et...Onnis??!!).
Ah, ça, pour une surprise, c'était une surprise, on avait appris plus tard que tout avait débuté lors d'un comité de sélection où un technicien en regardant les stats du championnat de France (66 buts à eux deux pour la saison 77/78) avait suggéré, croyant faire une blague de potache : "On devrait prendre Onnis et Bianchi, en plus, en Argentine, ils joueraient à domicile !!"
La suggestion avait fait rire toute l'assemblée sauf Hidalgo qui eut une illumination et se dit immédiatement, pourquoi pas ?! . Bien évidemment pour Bianchi c'était inenvisageable, il avait déjà porté le maillot de l'albiceleste une quinzaine de fois mais pour Delio Onnis, qui sait, après tout, il était déjà italo/argentin, avait la double nationalité, n'avait jamais été sélectionné pour l'un ou l'autre de ces pays puis séjournait en France depuis assez longtemps pour être naturalisé. On dépêcha en urgence un dirigeant de la FFF auprès des autorités compétentes, on vérifia l'éligibilité du cas auprès du ministère concerné puis Hidalgo rencontra l'intéressé qui accepta avec enthousiasme, revanchard qu'il était de ne jamais avoir eu la reconnaissance internationale qu'il méritait et c'est comme cela que 72 heures après ce "poisson d'avril", Delio Onnis devenait français et donc sélectionnable.
Après la stupeur de "l'affaire Onnis" et les nombreux éclaircissements demandés par les journalistes, ceux-ci avaient interrogés le technicien français sur sa sélection à priori déséquilibrée et manquant d'éléments défensifs. Hidalgo avait alors rétorqué qu'il n'allait pas disputer une phase finale de coupe du monde pour "subir le jeu mais pour en produire" avant d'ajouter malicieusement : "Comme dans une partie d'échecs, le football se gagne au centre du terrain puis oubliez les étiquettes/les cases prédéfinies et pré cochées à l'avance, Henri Michel et Dominique Bathenay peuvent tout aussi bien jouer derrière, tout comme Michel Platini en attaque, d'ailleurs".
La France avait hérité d'une poule on ne peut plus difficile avec l'Argentine (pays hôte), l'Italie (bête noire depuis 50 ans) et la Hongrie qui, même si elle n'était plus celle du Puskas des années 50 s'était qualifiée brillamment. Aussi se demandait -on, dans les milieux bienpensant et autorisés à quelle sauce nos bleus allaient être mangés, à la bolognaise ou à l'asado?
Après avoir traversé l'Atlantique en Concorde et pris leurs quartiers à l'Hindu Club, les Français purent se concentrer sur leur première rencontre à Mar del Plata face à nos voisins transalpins.
Pour son entrée dans le tournoi, le sélectionneur avait opté pour une équipe "classique", savant mélange d'expérience et de jeunesse avec Bertrand-Demanes dans les buts, une charnière centrale composée de Trésor/Lopez, deux latéraux Battiston et Janvion, un milieu à 3 où Guillou retrouvait un rôle plus défensif derrière Platini et Michel chargés d'alimenter un trio d'attaque Six/Lacombe/Rouyer du plus bel effet.
Et quelle ne fût pas notre surprise de voir dès la première minute de jeu, Didier Six s'échapper sur son aile gauche, centrer impeccablement pour Lacombe qui, d'une tête splendide aux 6 mètres crucifiait Dino Zoff, le portier italien. Les joueurs français eux-mêmes parurent étonnés, décontenancés par la chose et, malheureusement, au lieu de les libérer, cette fulgurante ouverture du score sembla les paralyser durant les minutes qui suivirent. A contrario, les Italiens semblèrent galvanisés par cette catastrophique entame de match, Causio donnait le tournis à Janvion, le jeune Rossi s'amusait de Lopez et Antognoni, le talentueux joueur de la Fiorentina régnait sur l'entre jeu. Et ce n'est donc que justice si à la 29ème minute, Rossi égalisa en reprenant une tête sur la barre après un centre du Turinois Roberto Bettega.
A la mi-temps des hostilités, Hidalgo fit entrer Onnis pour sa première cape à la place de Lacombe transparent durant toute la première période malgré son but (pris par la tenaille Gentile/Scirea) et Sahnoun à la place de Guillou pour tenter de reprendre le contrôle du milieu de terrain.
La sélection du Nantais avait fait débat car victime d'un accident cardiaque un an auparavant, il revenait à peine de convalescence depuis quelques semaines mais les autorités médicales avaient donné leur feu vert puis l'entraineur français l'avait testé positivement lors d'un match amical en mai contre l'Iran. Bien lui en prit car l'entrée de Sahnoun changea radicalement la physionomie de la partie, non seulement il neutralisa Antognoni, le métronome italien mais il impulsa un nouvel élan à l'équipe toute entière. Henri Michel était sur tous les ballons, Janvion muselait enfin Causio et surtout Battiston/Platini/Rouyer s'entendaient comme "Lorrains en foire" sur ce côté droit atone avant la pause. Et c'est justement sur un mouvement du trio complice que l'ailier Nancéien, à la 66 ème minute, déborda son adversaire direct Cabrini, centra fort dans la surface où Onnis surgit, sentant le coup comme à son habitude, entre Scirea et Gentile, pour marquer de près du genou/tibia/péroné ??!!. Le néo goleador français, chaussettes baissées, avait touché 2 ballons durant 20 mn mais avec une demi occase "plantait" un but primordial pour la suite des débats.
Il restait un peu moins d'un quart d'heure à jouer et la France menait devant l'Italie pour son premier match en coupe du monde depuis 12 ans, on croyait rêver...
Ces longues dernières minutes parurent interminables mais nos bleus se battirent jusqu'au coup de sifflet final avec beaucoup d'abnégation et vaillance, on vit Six revenir défendre (inédite situation à noter) dans son couloir gauche pour contrer les montées de Tardelli, Trésor commander ses troupes avec autorité, Lopez harceler Rossi et toute l'équipe ne rien lâcher d'un pouce face aux assauts de la Squadra Azzura. Car malgré quelques situations brulantes sur le but de Bertrand-Demanes où "le grand" s'imposa d'ailleurs avec talent en gardant sa cage inviolée, le score en resta là jusqu'au coup de sifflet final libérateur...