Podcast des légendes: À ce moment-là, qu'est-ce qui te passe par la tête ? tu as des Flashs de toute ta carrière ou tu commences à stresser ?

Christian Perez : Non, sur le coup, c'est fort.  C'est une émotion qui est très forte. Tu rentres chez toi après, tu dis à ton épouse, écoute, j'ai une très belle nouvelle à t'annoncer. Je suis sélectionné en A, ça fait le tour de la famille en deux temps, trois mouvements et petit à petit le rassemblement.

En plus, très sincèrement, il y a eu une très grosse information sur ma sélection parce que j'arrive en même temps que le meilleur, un des meilleurs joueurs français de tous les temps qui est Platini. Il y a eu un impact médiatique pour moi, ça a été fort, c'était sympa.

Podcast des légendes : Alors, pour nos auditeurs, je redonne un peu le contexte. Henri Michell vient de se faire débarquer, c'est une sorte de coup d'État de Claude Bez, un peu Platini. Je crois que c'est Fournet-Fayard et il me semble Jean-Luc Dermont .

Christian Perez : oui, il était là aussi dans les arcanes, je sais plus. (rires)

Podcast des légendes : Le grand argentier du football et donc Platini qui est encore tout jeune puisqu'il a pris sa retraite de footballeur en quatre-vingt-sept donc il reprend du service et le nouveau sélectionneur Henri Michel débarqué à cause d'un match assez horrible contre Chypre, un partout.

Platini, premier geste fort, c'est qu’il arrive à ramener Tigana qui avait pris sa retraite, il arrive à le convaincre de revenir donc il amène du sang neuf avec toi. Est-ce que tu as une conversation avec Platini lors des premiers entraînements ? Comment ça se passe ?

Christian Perez : Oui, il m'a pris à part. Je crois, on a discuté un petit peu et j'ai l'impression qu'il m’appréciait. Il appréciait peut-être l'homme, puis ma façon de jouer. Il avait même mis dans un journal que j'aurais très bien pu jouer avec leur fameux quatuor de l'équipe de France.

C'était quelqu'un en plus moi, je l'estimais. Aussi, quelqu'un qui vous sélectionne pour la première fois, ça me paraît normal, même si ce ne sont que vos résultats, ce ne sont pas par rapport à votre bonne tronche, mais oui, il y avait Gérard Houiller aussi.

Gérard m'avait dit que c'était lui qui me connaissaient le mieux. C'était rare, Houillier qui me connaissaient mieux que Platini, mais en tout état de cause, c'était le sélectionneur de Platini et c'est avec lui que je suis arrivé.

Podcast des légendes : Est-ce que tu te souviens comment tu es venu physiquement au rassemblement ?

Christian Perez : je suis venu un taxi, mais s’il fallait que je refasse le fil conducteur de la journée, je serais incapable. C'est malheureux, mais pour moi, c'est une période de ma vie qui est partie et je vis l'instant présent.

Podcast des légendes : Premier match, est-ce que tu te souviens un petit peu de la causerie tactique de Platini parce que les autres joueurs de cette époque avec lesquels on a parlé, ils nous disaient qu’il avait une stratégie très joueuse. C'était pas …

Christian Perez : oui, c'était pas fermé le jeu. Non, il fallait jouer. Il estimait qu'on était plus fort que les Yougoslaves, je crois, même si il savait pas.  On avait ce défaut, c’est que les équipes françaises à l'extérieur n'était pas bien brillantes. Après, oui, il voulait qu'on joue parce que c'était dans ses tripes.

Le football, c'était pour lui, c'était l’offensif et ça lui a presque donné raison puisqu'on est allé quand même marqué deux buts même si on se fait rattraper. À la fin, on perd le match. On peut toujours dire que il a fait de mauvais changements, mais c'est le football.

Podcast des légendes : Je me souviens de ce match. Pour ma génération, je suis né en soixante-dix-sept après la Coupe du monde Quatre-vingt-six. On a un peu cette impression que l'équipe de France va toujours être extraordinaire parce qu'on a connu Quatre-vingt-deux et éventuellement on a ensuite connu Quatre-vingt-quatre, on a connu Quatre-vingt-six, donc pour nous, la normalité, c'est une équipe qui soit gagne, soit est en demi-finale.

Quand il y a cette espèce de semi-traversée du désert entre Quatre-vingt-six et quatre-vingt-huit, quand Platini, qui était mon héros absolu, en tout cas mon premier héros absolu quand il est nommé sélectionneur, il y a un vent d'espoir extraordinaire et donc, je me souviens de ce match vraiment très bien. Je me souviens surtout ton premier but parce que là, on se dit, c'est pas possible. Platini, il a… ça y est. C'est la patte magique qui sélectionne Perez, un nouveau joueur qui a sa première sélection et claque trois minutes plus tard « But ».

Qu'est-ce qui te vient par la tête quand tu… ?

Est-ce que t’as le temps même de savourer quand tu marques ce premier but, je rappelle après seulement trois minutes de jeu contre les Yougoslaves ?

Christian Perez : Non, je savoure pas, c'est qu’il faut savoir que je suis dans un stress que je connais pas. Un jour avant le match, j'étais très angoissé parce qu'on ne sait pas où on va. C'est un autre milieu, c'est un autre niveau et le fait de marquer rapidement, putain, ça a été pour moi un soulagement et ça m'a donné une confiance extraordinaire.

Podcast des légendes : Alors, pour nos auditeurs qui s'en souviennent pas, je rappelle le but, il est transversale de Tigana donc pareille à une trouvaille de Platini, défenseur yougoslave, je crois que c'est Stan Ikovic qui se troue quand tu arrives et que tu piques le ballon dans la surface et voilà. 

Déroulement du match :

Les Yougoslaves qui marquent un autre but. Ensuite, milieu de seconde mi-temps, je crois que c'est toi qui fais la passe décisive pour Sauzée, qui marque. 

Christian Perez : Oui

Podcast des légendes : La France qui reprend l'avantage est là, Platini te remplace par ton copain du bataillon de Joinville, Daniel Bravo

Christian Perez : ouais, c'était mon ami

Podcast des légendes : Malheureusement, dix minutes plus tard, les Yougoslaves ont marqué deux autres buts et le match est perdu

Christian Perez: Oui, tu as tout à fait résumé le… ça s’est passé comme ça et puis ça fait partie du jeu. Certains diront mauvais coaching, d'autres…

Qu'est-ce qu'on peut faire ? C'est comme ça. On ne peut rien changer aux choses. On perd trois à deux, et puis… mais c'est peut-être pas là qu'on perd la qualification. C'est sûrement en Norvège, je crois, où on n'est même pas capable de gagner et c'est là où on ne se qualifie pas pour la Coupe du monde.

Podcast des légendes : C'est ça le groupe. Il y avait la Norvège, l'Écosse, le Chypre, Timor…

Christian Perez : La Yougoslavie ?

Podcast des légendes : La Yougoslavie, évidemment oui. Et puis voilà, la France fait match nul à Chypre, perd un point, Zéro-zéro contre la Yougoslavie à domicile et puis vous perdez deux-zéro contre l'Écosse et je crois que c'était Mo Johnston qui il me semble jouait à Nantes à une époque.

Guillaume, tu confirmes ?

Podcast des légendes : oui, il y était

Christian Perez : Le match en Écosse, je ne me rappelle pas, mais par contre, on ne marque pas. On ne gagne pas contre la Norvège et je crois zéro-zéro. Tu es éliminé et tu feras jamais une coupe du monde, en tout cas, moi, je ferai jamais de coupe du monde.

Podcast des légendes : A ce moment-là, tu te dis pas ça Christian. Quand tu ne la fais pas, tu ne dis pas que tu vas pas la faire. C'est juste…

Christian Perez : Non, tu dis à la prochaine. (Rires)

Podcast des légendes : c'est ça la prochaine.

Christian Perez : Sauf que la prochaine qui n'est pas non plus parce que t’es plus dans le groupe.

Podcast des légendes : De toute façon, la prochaine, on ne l'a pas eu non plus Christian. Tu sais, c'était quatre-vingt-quatorze donc finalement…

Christian Perez : Oui, je m'en rappelle, c'était catastrophique.

Podcast des légendes : Oui, donc finalement bon…

Christian Perez : je parle du scénario

Podcast des légendes : Oui.

Christian Perez : c'était inimaginable.

Podcast des légendes : Justement, avant d’avant d'arriver à quatre-vingt-quatorze et à quatre-vingt-douze, cette campagne incroyable d’éliminatoires de l'Euro, t’es quand même vraiment un pilier de Platini ?

Christian Perez : Oui.

Podcast des légendes : Il t’installe assez rapidement. Est-ce que ça te donne un boost au niveau de la confiance d'être un des piliers d'un des deux meilleurs joueurs de l'histoire de l'équipe de France à ce moment-là ?

Christian Perez : Oui, c'était une période où j'étais heureux. J'étais presque moins bon avec le PSG que je ne l'étais avec l'équipe de France et Michel Platini vient me voir à un moment donné avant de sortir à l'échauffement. Il me dit, tu sais que beaucoup de gens parlent de toi en Europe ? Et je me suis dit « putain Perez, tu te sous-estimes un peu peut-être » et t’es pas mauvais, mais je pense que tu te sous-estimes un peu trop. Ça me donnait quand même une grande confiance en moi.

Podcast des légendes : À ce moment-là ton agent, est-ce qu'il travaille des heures "supp" justement pour te renégocier un meilleur contrat au PSG ? pour trouver d'autres offres ? Comment ça se passe ?

Christian Perez : Non.  En quatre-vingt-douze ?

Podcast des légendes : Ouais, quatre-vingt-dix, quatre-vingt-douze.

Christian Perez : C'est vraiment une période pour moi de grandes désillusions, c'est-à-dire, que je me suis fait blouser par un agent qui est… Je ne vais pas citer son nom parce que j'ai même pas envie de le faire de la pub, que j'ai pris après, j'ai été un peu influencé à droite et à gauche. Tu verras et en fait, Michel Denisot est venu me voir tout de suite dans le vestiaire avec PSG. Il me dit Christian, il y a un truc que je comprends pas, tu es un super joueur, mais on ne parle pas beaucoup de toi et je lui ai dit écoute Michel, ça ne tient qu'à toi.

Si tu veux qu'on parle de moi, mais fais ce que tu veux pour qu'on puisse parler de moi. C'est vrai que je n'étais pas quelqu'un qui était très fort en communication et sur le coup, il me dit Christian, il faut qu'on se rencontre. J’aimerais qu’on résigne ensemble.  Putain, j'étais très heureux.

J’ai été très heureux parce que j'ai adoré cette ville de Paris avec les avantages, sans les inconvénients, puisqu'on habitait Saint-Germain-en-Laye. On venait d'acheter une maison et on était heureux en famille dans cette banlieue ouest et j'attends. J'ai attendu et je ne voyais jamais Michel me dire "alors Christian, quand est-ce qu'on résigne", et...

C'est plus un soir en boîte de nuit qu'il est venu me voir avant de partir pour l'Euro et comme je vous l'ai dit, je suis quelqu'un de, on peut dire impulsif ou très con. (Rires)

J'avais bu deux verres de… J'avais dû trop boire, un peu trop par rapport à ce que je buvais en ce temps-là et il me dit, mais Christian, qu'est-ce que tu fais l'année prochaine ?

Je dis écoute, Monaco me propose trois ans. Si tu t’alignes, je reste à Paris. Il me dit non, on vient d'arriver. Trois ans, c’est pas possible. Comme un couillon, au lieu de lui dire "écoute Michel, profitons de cette belle soirée, on se revoit demain matin si tu veux avec les idées claires", je lui ai dit non, écoute, c'est comme ça, e me barre. 

Avec le recul, j'ai tout compris à l'histoire, c'est-à-dire que mon agent était mandaté par Monaco pour rapatrier les joueurs que voulaient Arsène Wenger. C'est avec le recul que je me suis dit "Putain Perez, tu t'es bien fait baiser" donc il n'a jamais travaillé pour que je re-signe au PSG, mais il a travaillé pour que je parte à Monaco et il n'a même pas travaillé correctement mon salaire et j'ai continué à Monaco. J'ai traîné mon âme en peine parce que je n'étais pas heureux là-bas.

Podcast des légendes : ça tu l’apprends quand tu es déjà à Monaco ou tu l’apprends bien après ?

Christian Perez : Non, je l’apprends…Vous savez, quand on mûrit à la fin de sa carrière, tu te dis, je suis con, mais j'ai tout compris. C’est à la fin du bal qu'on paye les artistes et c'est à la fête que t’as vu que tu comprends tout malheureusement.

Podcast des légendes : Du coup, ça t'empêche d'apprécier ton passage à Monaco qui avait quand même une très belle équipe, un très bon entraîneur, etc.

Christian Perez : Oui, mais…

Podcast des légendes :  Tu commences vraiment dans de mauvaises dispositions.

Christian Perez : Je me rappellerai toujours Daniel Bravo, qui était un ami, que j'aimais beaucoup. Daniel avec Eva et mon épouse, on se rencontrait très souvent. Quand on était au PSG, je lui ai dit, tu sais, Daniel, je risque de partir à Monaco. Il me dit Christian, ne fait pas ça, c'est pas un club pour toi et j'aurais dû l'écouter .je me suis vautré, j'ai été blessé souvent et j’ai pas été bon.

Podcast des légendes :  J’ai l’impression, mais peut-être que je me trompe: Christian essaie vraiment et je suis désolé, mais moi, j'avais le souvenir en le voyant que, en tant que joueur, tu ne mentais jamais, c'est-à-dire que tu donnais tout sur le terrain et t’étais entièrement vrai donc t’étais incapable de jouer un rôle ou de jouer autre chose.

Pour le coup, c'est vraiment le souvenir que j'ai d'un joueur tout le temps entier et qui donnait tout ce qu'il pouvait. Est-ce que c'était vrai ou …. ?

Christian Perez : Oui. J'ai toujours fait le maximum, mais avec des moments où on aurait peut-être pensé que…

Vous savez, on ne triche pas. Moi, personnellement, je ne trichais jamais, mais il y a des périodes où tu n’es pas bien.

Je suis quelqu'un, mais je suis comme ça dans la vie. Vous voyez, je travaille dans l'immobilier et quand certaines personnes me disent, vous, dans l'immobilier, vous êtes pas… c’est pas tout clair, ça peut me mettre vraiment en colère parce que quand t’es profondément honnête, je ne dis pas que je suis l'abbé Pierre, mais je suis honnête.

Je suis quelqu'un qui, je dis toujours ce que je pense, mais gentiment, pour ne pas faire de mal aux gens si on me le demande, et je suis quelqu'un de normal, de bien.

Podcast des légendes : Il y a un petit paradoxe, c’est que t’es né à Marseille et pourtant tout le monde honnêtement t’associes à Paris. Comment tu gères justement ce paradoxe ? Comment tu as géré ?

Christian Perez : Je le gère très bien. Alors, il faut savoir que toute ma famille est basée en Provence et j'ai de la famille à Marseille et notamment, j'ai appris que le petit, il y a le fils d'un de mes cousins qui était là pour mettre l'ambiance derrière les buts. Vous savez, les fous furieux qui ne regardent pas le match, mais qui… (Rires)

Christian Perez : Je ne le connais pas. Franchement, quand j'avais l'âge de huit ans, mon rêve aurait été de jouer à l'OM, mais une fois que je suis parti dans ce club de Paris, je vous assure, c'est un club que j'aime beaucoup.  C'est le club qui m'invite pour aller voir un match. Quand je les ai appelés, ils m'ont donné des places pour aller voir le match et ça, c'est important pour moi parce que dans les autres clubs, je suis même pas certain qu'on me donnerait des places, des vraies places de foot

Podcast des légendes : il y a une certaine reconnaissance et moi je connais beaucoup de fans de Paris qui associent à 100 % l'image de Christian Perez à Paris, encore une fois sur un joueur qui a toujours été ultra-droit vis-à-vis de Paris et en donnant toujours tout sur le terrain.

Je me souviens d'images où quand il sortait, t’étais hyper énervée ou quand tu jouais pas ou t’étais pas titulaire.

Christian Perez : oui, mais pour moi, le grand manque de ma vie de footballeur, ça sera que mon histoire avec le PSG, elle devait continuer. Il n’était pas question que je signe ailleurs. J'étais heureux à Paris et malheureusement, c'est un goût d'inachevé et je vous assure que, il y a des nuits où je me réveille encore en me disant, mais putain Perez, mais pourquoi tu t'es dépêché d'aller raconter que c'était comme ça et pas autrement, alors que …. C'est comme ça.

J'ai fait des placements financiers comme ça, j’ai, fais, confiance aux gens, mais après ça fait mal à la tête.

Podcast des légendes : On a l'impression que cette période de fin des années 80, début des années 90, c'est un peu l'émergence des agents véreux. Il y avait les histoires de Bruno Bellone, il y en a eu d'autres que je n'ai pas en tête particulièrement, mais je ne sais pas pourquoi.

Si c'est parce que il a commencé à avoir plus d'argent dans le football, s'il y a peut-être moins de régulation, il y a peut-être moins de règles, il y a peut-être pas de critères pour être agent…s

Podcast des légendes : C’est exactement ça.

Podcast des légendes : J'ai l'impression qu'il y a deux, trois agents qui sont sérieux, qui sont restés sérieux et puis t’as tous les autres qui étaient des branquignols qui…

Christian Perez: Ils mangeaient à tous les ..., mais moi, il y a cinq ans, si je devais travailler et je m’en mordrais les doigts toute ma vie, c'est un gars que peut-être, vous ne connaissez pas. C'est Eric Castagnino qui est agent de joueur et qui était un joueur de Nîmes Olympique. C'est quelqu'un en qui on a tous eu confiance parce qu'on jouait avec lui. C’était un amour d'homme et malheureusement, pourquoi on va avec des personnes qui ne vous ressemblent pas ? En plus, l'agent avec qui je travaillais, très franchement, je pouvais même pas le voir, donc voilà des conneries, mais vous savez, on a été la première génération à gagner de l'argent.

Podcast des légendes : oui.

Podcast des légendes : C’est ça effectivement.  C'était un peu un nomadsland au niveau des règles pour être agent. Maintenant, je sais qu'il y a une licence à la Fifa, etc. donc c'est un peu plus structuré. Mais effectivement, vous êtes arrivé au moment où le côté positif, c'est qu'il n'y a plus d'argent et plus d'agents. Le côté négatif, c'est que les loups étaient dans la bergerie.

Christian Perez : Vous pensez qu'aujourd'hui dans le football il y a moins d'escrocs ? Moi, je pense qu'il y en a 100 fois plus.

Podcast des légendes : Effectivement, c'est possible, mais j'ai l'impression qu'il y a plus de garde-fous.

Christian Perez : Je serais curieux de savoir quels placements font les joueurs maintenant. Ils ont tellement d'argent que ils peuvent se permettre d'en perdre, mais à partir du moment où vous avez beaucoup d'argent qui transitent dans les mains de gamins que sont les footballeurs, s’ils sont mal encadrés, je pense qu'il doit y avoir une sacrée perdition de pognon.

Podcast des légendes : Moi, je dirais juste que six ans d'argent à mettre, à placer, je conseille d'excellents placements immobiliers du côté de Biscarrosse. Je peux les mettre en relation avec… (Rires)

Christian Perez : Je n’aurais pas de maison assez grande à leur fournir.

Podcast des légendes : Guillaume, t’allais dire quelque chose ? Tu as terminé de manger ton chocolat Guillaume ? c'est bon ?

Podcast des légendes : Ouais, j'ai eu une petite faim…

Christian Perez: … de l'hypoglycémie ?

Podcast des légendes : Ouais, exactement de l’hypoglycémie, mais il y a l'histoire de Yohan Mollo récemment qui a avoué qu'il avait perdu son argent à cause d'un agent qui l'avait blousé donc…

Christian Perez : J'ai lu ça sur YouTube.

Podcast des légendes : Effectivement ça ne semble pas complètement finir ces histoires.

Christian Perez :  Bien sûr que non ! Quand vous savez que vous avez des voyous qui ont pignon dans les stades, qui peuvent entrer facilement, voir les entraînements alors que des anciens joueurs n'ont même pas la capacité de rentrer dans le stade, alors je vais vous dire, je suis bien content d'avoir quitté ce milieu parce que c'est à l'opposé de mes convictions.

Podcast des légendes : On va malheureusement revenir un peu dans le milieu pour continuer à parler de…(Rires)

Pour revenir à ce que disait Guillaume qui parlait de Marseille. Cette époque où tu joues au PSG de quatre-vingt-huit à quatre-vingt-douze, tu es Monaco après, on a eu Jean-luc Ettori sur le programme. Quatre-vingt-treize, c'est au moment où l'affaire OM Valenciennes devient public.

Podcast des légendes : Est-ce que, en tant que joueur d'une autre équipe, est-ce que vous avez un petit peu des suspicions ? Est-ce que vous avez un petit peu des doutes sur certains résultats ? Ou Est-ce que c’est quand l'histoire sort, est-ce que tu tombes des nues toi ?

Christian Perez: Non, parce que moi, à Paris, j'avais des suspicions quand on a perdu le titre.

Podcast des légendes : Qui étaient basées sur...?

Christian Perez: Quand on a perdu le titre, Il y a eu des choses qui nous ont paru bizarre, je n'en dirai pas plus.

Podcast des légendes : C'est marrant parce que tout le monde dit ça alors, je ne veux pas te mettre…

Bien entendu, si tu n’es pas confortable pour en dire plus, c'est quand même une histoire. Ça s'est passé il y a plus de trente ans maintenant.

Podcast des légendes : Ouais quasiment 30 ans.  Il y a eu des livres, il y a eu des comptes rendus, etc. C'est très publique. Bernès a été en prison, Tapie aurait dû ou je ne sais même pas au final s’il est en prison, mais il y a toujours … 

Christian Perez :  Je l’ai appelé pour que je signe à Marseille avant de jouer le fameux match, mais Bernès, vous voulez que je vous rappelle où il se trouve en ce moment ?

Podcast des légendes : ouais, il est agent de joueur, c’est marrant.  

Christian Perez : Il fait partie des agents les plus influents du football français.

Podcast des légendes : ouais, c'est ça.

Christian Perez : Pourquoi vous voulez que j'aille me raconter des choses qui pourraient toucher des gens que j'appréciais en tant qu'homme? Non, je ne vais pas parler de qui que ce soit. Je vous dis que j'ai ressenti des choses à un moment donné à l'aise et je me dis que peut-être certains joueurs ont profité de prendre un peu d'argent pour...

Je ne veux même pas y penser qu'un joueur puisse prendre de l'argent pour perdre, mais peut-être que c'est arrivé

Podcast des légendes : D'accord, mais on ne veut pas que tu nous donnes de nous ou quoi que ce soit. Je comprends parfaitement la réticence. On a eu Jean-Luc Ettori qui nous racontait un petit peu combien, sans donner de nom, qu'il a su que certains de ses coéquipiers avait balancé un match et combien lui-même, il tombait des nues, combien il s'y attendait pas du tout. Ça avait changé complètement ses relations avec d'anciens coéquipiers.

Christian Perez : je sais parce que je l'ai vécu avec Monaco. Il y avait des tensions, on ne comprenait pas ce qui se passait.

Christian Perez : Je pense que, peut-être Arsène Wenger était au courant que nous, peut-être, que certains joueurs ont su la vérité. Très sincèrement, en ce qui concerne Monaco, j'en ai entendu parler, on en a parlé entre nous, mais je ne peux pas vous garantir, je ne connais pas du tout les joueurs impliqués.

 

Podcast des légendes : D'accord, mais je cherche même pas à savoir les noms. Nous en tant que fan, on était forcément soit fan de Paris, soit de Marseille, souvent les deux quand il y avait une coupe d'Europe et c'est vrai que, voire des années plus tard, il y a avait vraiment tout un système. C'est intéressant de savoir les joueurs qui jouaient contre Marseille et qui étaient en concurrence avec Marseille pour les titres de champion, etc.

Est-ce que dans le vestiaire, les joueurs en discutaient ? Est-ce qu'il y avait des suspicions, est-ce qu’il y avait des doutes ? C'est vraiment quelque chose qui nous a toujours intéressé.  

Christian Perez : il y avait de la suspicion, il y avait des doutes, mais on a toujours eu des doutes sur quelque chose. J'ai entendu des doutes sur des joueurs qui se dopait, mais comment voulez-vous en parler quand vous ne savez pas la vérité ?

Podcast des légendes : Ouais, bien sûr.  

Christian Perez : C'est de dire, lui se dope, mais est-ce que tu as des preuves ? J'en ai parlé. On dit qu'il n'y a pas fumée, sans feu, mais c'est…

Podcast des légendes : Ouais, c'est vrai, t'as raison et en plus le dopage dans le foot, il est quand même moins médiatisé que, par exemple, le dopage…

Christian Perez : Ouais, mais, tu te poses la question : comment font-ils ? 

Tous ces joueurs parlent, ils ne sont jamais fatigués, ils ont jamais de trou. Moi, je sais que janvier, février, mars, c'était compliqué pour moi. (Rires)

Podcast des légendes : ça fait quand même cinq mois Christian. (Rires)

Podcast des légendes : Petite question justement Christian et tu n’es pas obligé de répondre. Est-ce que toi, à un moment donné, t'as pensé à te doper quand tu étais moins bien, etc.

Christian Perez : Là, je vais vous dire la vérité. La seule fois où on m’a planté une aiguille dans les fesses, c'est je dis à Jean Fernandez parce qu'il m'avait tanné pour le faire. Je lui ai dit, tu vois, c'est la première fois que je me dope. Ce n’est même pas du dopage. C'était de la vitamine C, la B 12 comme on la connait.

Je lui ai dit, « tu vois, c'est la première fois et c'est la dernière ». Je le fais parce que tu me gaves avec ta connerie, mais je ne le referais pas. C'est pas la peine de m’en parler.

Je l'ai fait une fois. Je vous le dis, ça n'a rien donné du tout, c'est de la connerie, mais quand on en est là. Je ne me suis jamais dopé, au grand jamais, sauf venant de mon père, mais je l’aurais senti.

Podcast des légendes : Quand vous jouiez contre des équipes, tu disais quand tu sentais que le mec qui était 10 fois plus agressif quand vous jouiez contre ce genre d'équipe, est-ce que vous en parlez après le match ? Est-ce que vous avez parce qu'il y avait un sentiment d'injustice incroyable ?

 

Christian Perez: Non, tu ne penses pas, tu joues, tu te dis, ils sont plus forts que toi. Ils sont plus agressifs peut-être, parce que c'est leur nature. Tu penses pas parce que si chaque fois que tu te mets à penser ça, tu te dis finalement, je suis plus fort, je perds pas contre les mecs qui trichent. Non, je n'ai pas de la faiblesse de penser que les gens sont tous propres parce que il y a trop d'argent. Il y a quand même des joueurs de grand talent, il y a des joueurs qui nous régalent, peut-être qu'ils ont besoin de produits de récupération, je ne sais pas.

Vous savez, je suis sorti d'un milieu d’ouvrier, de footballeur. Aujourd'hui, les joueurs, ils sont très bien suivis. Je sais plus ce qui se passe, j’y suis plus du tout, mais dans mon temps, on ne pensait pas que l'équipe adverse qui nous avait battus était dopé. On disait dans le vestiaire, il y a des joueurs qui se dopent.