Un nouvel épisode chaque semaine

Maxime Bossis, 2e partie, suite

Le Podcast des Légendes: Comment ça se matérialise justement cette ambiance un peu dure ?

Maxime Bossis: Non, mais ça se matérialise sur certaines choses, pour des maladresses par exemple, qui n'ont rien à avoir avec Jean-François ou d'autres, on est tous avec Michel Platini et Jean Tigana. Il y en a un, Michel, il est né le vingt et un juin. Moi je suis né le vingt-six, Jean Tigana le vingt-trois et donc on fête à l'hôtel l'anniversaire de Michel ce qui est tout à fait logique.

Et il n'y a rien de prévu pour Jean Tigana donc, qui revient avec un gâteau à la fin du repas et une bougie pour dire, moi aussi c’est mon anniversaire, donc après ils ont été les meilleurs amis du monde, mais quelque part, voilà donc c'est, il y a des choses pas toujours adroites.

Et puis forcément, c'est la deuxième défaite lors d'un premier match à la Coupe du monde après soixante-dix-huit. Et là, on est beaucoup critiqués par la presse française qu'on a tous les jours. Et on sait que beaucoup d'anciens, notamment ou de journalistes disent ils vont faire comme en soixante-dix-huit.

Qu'ils préparent leurs valises, ils sont déjà, ils vont partir chez eux quoi. Donc, on a un sentiment de revanche, mais également une ambiance compliquée pendant trois, quatre jours. Mais on a su se relever très vite, c'est la plus grande fierté.

Le Podcast des Légendes: Est-ce que Hidalgo t’inclut, enfin en tout cas est-ce qu'il consulte ce conseil des sages lorsqu'il décide d'instaurer le carré magique, sachant que ça va donner beaucoup plus de pression pour la ligne défensive puisque les quatre milieux n'étaient pas connus comme défendant énormément, vous savez que vous allez être mis beaucoup plus à contribution ?

Maxime Bossis: Ouais, c'est logique, on le sait. Mais, on sait que derrière, on va être mis plus souvent à contribution qu'on risque de se retrouver malgré la présence de Jean Tigana, souvent en un contre un, donc il y a moins la sécurité, notamment celle qui avait en quatre-vingt-dix-huit en France, par contre non, je ne me souviens pas de réunions et il ne demande pas forcément l'assentiment, peut-être qu'il a vu Marius, Michel et d'autres.

C'est après qu'il a consulté de plus en plus. Mais là, je ne me souviens pas s'il a vraiment consulté quatre ou cinq joueurs pour nous parler de cette nouvelle façon de voir évoluer l'équipe.

Le Podcast des Légendes: Donc vous passez le premier tour, match nul contre la Tchécoslovaquie. Ensuite, l’Irlande du Nord quatre à un, vous battez l'Autriche un, zéro, but de Genghini, est-ce qu'à ce moment-là, donc vous avez passé le premier tour, vous avez moins de pression ou est-ce que vous vous dites là, c'est… la compétition commence vraiment. Quel est votre état d'esprit à ce moment-là ?

Maxime Bossis: Oui, on laisse derrière nous une grande partie de cette pression négative qu'on peut tous avoir dans la vie, dans chaque métier, mais encore plus certainement dans un sport de haut niveau. En disant, on a réussi à faire le minimum de ce qu'on espérait, c'est-à-dire passer le premier tour. Donc on débute ce mini championnat de deux, trois, avec des équipes qui sont a priori, on le sait, à notre portée et avec encore un petit peu plus d'assurance.

Et là, on se dit, allez, on a peut-être un bon coup à jouer. On peut peut-être faire encore mieux que ce qu'on avait prévu au départ.

Le Podcast des Légendes: Et donc là, une équipe type se dégage. Est-ce que tu sens, est-ce que vous vous sentez de plus en plus à l'aise ? Est-ce que justement à la veille du match contre les Allemands, est-ce que vous avez une grosse discussion tactique avec Hidalgo ou c'est comme toujours très organique qu’il consulte un peu les joueurs, et cetera ?

Maxime Bossis: Il n'y a pas plus de discussion tactique avant le match contre les, en parlant du match de l'Allemagne tu veux dire ? Oui, si, il y a une discussion tactique enfin personnelle avec Manu Amoros par rapport aux gabarits. Moi je suis souvent arrière droit et Manu à droite, pardon arrière gauche, je joue souvent à gauche et Manu à droite ou Patrick Battiston à droite, mais c'est Manu qui avait pris la place. Et là pour ce match-là, on change, on inverse les rôles, lui, il prend Littbarski, qui était un joueur assez vif, petit et feu follet. Et moi je passe à droite de l'autre côté, du côté de Maga, donc déjà une discussion tactique qu’on a eue avec Michel Hidalgo et Manu, donc on est tout à fait d'accord pour ça et sinon autrement non, pas de grosses discussions tactiques, mais toujours cette façon qu'avait Hidalgo de nous motiver, d'insister encore plus avant l'Allemagne, sur le privilège qu'on avait de représenter la France, d'être parmi les onze ou vingt-deux joueurs choisis pour des matchs aussi importants alors qu'on est quelques milliers de professionnels et qu'il y a parmi les millions de footballeurs amateurs, bien des millions qui voudraient aussi se retrouver à notre place et donc d'essayer d'évacuer la pression négative pour me dire prenez ça plutôt comme un privilège plutôt que pour une, plutôt que d'aborder ce match avec une peur.

Avec surtout cette façon de nous dire et nous redire qu’il faut surtout derrière, ne pas avoir de regrets, du moins dans le comportement. Il y aura toujours des regrets si on perd un match, mais dans le comportement, d'aller au bout de ce qu'on peut faire.

Le Podcast des Légendes: Et vous sentez l'engouement autour de l'équipe de France ou l'éloignement fait que vous êtes toujours dans, un peu dans votre dans votre cocon ?

Maxime Bossis: On ne sent pas vraiment l'engouement parce qu'on est quand même moins, on reçoit un peu la presse française, mais pas tout le temps avec un peu de retard, on n'écoute pas forcément les médias français, radios ou TV. Donc, ressens mon engouement, nous, on sait qu'on a franchi un cap. Et on s'est surtout qu'on va rencontrer une des meilleures équipes au monde depuis longtemps et c'était le cas en quatre-vingt-deux aussi et que là, et bien c'est le premier test grandeur nature dans la plus grande des compétitions pour un footballeur, une Coupe du monde. Et donc il y a quand même une petite trouille de ne pas être à la hauteur et de se prendre une raclée.

Enfin, on y a pensé, mais on y a pensé. Je pense que certains y ont pensé. J'y ai pensé un peu aussi en disant bon, vu comment on joue, je ne pense pas que ce sera le cas. Mais quand même en face, il y a du lourd.

Le Podcast des Légendes: Ouais.

Maxime Bossis: C'est quand même costaud.

Le Podcast des Légendes: Donc vous en parlez, vous êtes, vous avez cette franchise entre les joueurs, vous vous confiez vos peurs vraiment à voix haute ou vous êtes superstitieux ou vous préférez ne pas le dire ? Par exemple, je ne sais pas, tu dis à ton compagnon de chambre, et si on se prend une branlée demain, tu imagines la honte ou c'est plus, j’espère qu’on va bien réussir demain, comment ça se passe.

Maxime Bossis: Ouais, on en parle de façon très informelle avec ceux, avec qui on se trouvait le plus proche. Je sais que moi toute ma carrière, même si on était pourtant concurrents, je parlais énormément avec Patrick Battiston et plus tard avec Thierry Tusseau, et beaucoup de joueurs plus jeunes.

Sinon autrement je ne montre pas forcément les failles, enfin les doutes parce que je sais qu’à partir de quatre-vingt-deux, vingt-six, vingt-sept ans, on compte plutôt sur moi.

Pas tous, pas les plus anciens, pour les conforter dans leurs doutes et j'essaie toujours d'être, voilà d'être plutôt un bon conseil avec les plus jeunes ou ceux qui ont un peu plus d'incertitudes sur le match qui arrive, même si ça n'empêche pas moi d'avoir aussi les miennes, mes notamment, enfin mes incertitudes.

Mais bon, on en parle, en disant attention en face, il y a Brückner, il y a Förster, il y a Littbarski, enfin c’est.

Le Podcast des Légendes: Rummenigge.

Maxime Bossis: Ce qui se fait de mieux en Europe quoi.

Le Podcast des Légendes: Et tu parlais justement de ça, est-ce qu’avant un match, toi tu as le trac ou pas du tout ? Quand tu rentres dans ton match, est-ce que tu es concentré ou est-ce que tu as le trac ?

Maxime Bossis: Beaucoup de gens, beaucoup de joueurs ont pensé que j'avais très peu le trac ou pas de trac du tout, même parfois je lis des trucs parce que ça ne se transpirait pas par rapport à mon comportement. Mais oui, bien sûr, comme tout le monde, j'ai eu le trac avant chaque match, certains matchs de championnat quand on est un peu sûr de son fait.

Bon, j'en avais de moins en moins, mais les matchs de Coupe du monde, les matchs qualificatifs, même avec Nantes, bien sûr qu'on a le trac. On peut être moins bien un jour, on peut avoir en face quelqu'un d’exceptionnel qui est dans un jour fabuleux, un attaquant, et puis on peut souffrir. Donc oui, j'essaie de le cacher, mais il m'est arrivé, enfin.

Pour moi, c'était plutôt un trac positif. Je pensais pouvoir justement m'appuyer sur une certaine concentration et sur un trac pour, voilà, arriver, mais le trac, il est surtout avant les matchs, quand on a, quand le coup de sifflet est donné, souvent le trac disparaît assez vite.

Mais par contre, l'attente d'un match important est très longue, même une journée est très longue, avant le France, Allemagne, c'était très long la journée.

Mais je n’ai pas eu un trac qui ne m'a pas permis de progresser, heureusement.

Le Podcast des Légendes: Est-ce que tu avais une routine justement pour te déstresser les veilles de match ?

Maxime Bossis: Non, pas de routine vraiment les veilles de match si ce n'est essayer de dormir comme on pouvait. La routine c'est de, si, c'était dans les vestiaires avant le match, d'être toujours la même place, à côté des mêmes joueurs ou même si on ne connaissait pas trop le stade. Enfin c'était le cas surtout au Parc des Princes ou à Nantes.

Sinon autrement, il n’y a pas de superstitions vraiment, le matin du match par exemple, faire au minimum même s'il n'y avait pas d'entraînement, parfois il y avait un petit décrassage, parfois non. Et de faire une balade dans la nature avec deux ou trois joueurs, ça pouvait être Jöel Bats, Battiston ou un autre.

Enfin voilà, tous les copains de l'époque et donc ça permettent de déstresser, de marcher un petit peu plutôt que de rester enfermé dans une chambre à penser au coup d'envoi en se demandant si on va être à la hauteur.

Le Podcast des Légendes: Est-ce que tu penses que ton, Séville c'est ton plus beau match en équipe de France en termes de performance parce que tu fais vraiment un match extraordinaire.

Maxime Bossis: C'est gentil de penser que sur ce match-là je fais un bon match. Oui, avec le recul et en toute objectivité, je pense qu'il y a eu le match qui est, c’est Séville, le match contre l'Allemagne et le, France, Italie un peu plus tard même si on en a moins parlé que le France, Brésil en quatre-vingt-six au Mexique. Voilà les deux matchs, et pas seulement me concernant.

Pour toute la défense, je pense que oui, ce match-là, oui, je pense qu'on est, on a montré qu'on pouvait rivaliser. Moi, j'avais un challenge aussi personnel que je n’en parlais pas. Je voulais absolument rivaliser aussi avec Manfred Kaltz qui était le fameux arrière droit d'Hambourg, qui est un des meilleurs ailiers latéraux depuis pas mal d'années, avec Hrubesch qui faisait la paire Hambourg, qui étaient des, un grand joueur et donc je n'étais pas de son côté, mais je.

Voilà, je voulais montrer que je pouvais être un peu à sa hauteur. Donc il y avait un vrai challenge personnel, ouais.

Le Podcast des Légendes: Didier Six nous disait que la consigne d'Hidalgo justement c'était pour qu'il devait bloquer le couloir de Manfred Kaltz et d'après Didier.

Maxime Bossis: Oui, parce qu'il était aussi en avance sur son temps au niveau du rôle des latéraux avec quelques autres comme ceux qui connaissent Cabrini en Italie. Donc il était extrêmement offensif avec une grande facilité de centre, une très belle frappe de balle. Et donc il passait plus de temps à attaquer qu'à défendre donc il fallait vraiment bloquer son couloir.

Le Podcast des Légendes: Et donc Séville, c'est étrange qu'on parle encore de ce match quarante et un ans plus tard.

Le Podcast des Légendes: Qu’on continue à en parler, on en parle plus que de l'Euro quatre-vingt-quatre qui a eu lieu deux ans plus tard où c'est le premier trophée de la France. On parle, je pense, plus que de la Coupe du monde quatre-vingt-dix-huit. Tu as dit toi-même que c'était un peu le résumé, presque le résumé d'une vie de football ce match en cent vingt minutes, au-delà de ça pourquoi tu penses que ça continue à avoir cette espèce d'attrait, cette espèce de mystique autour de ce match ?

Maxime Bossis: Ouais, le côté peut-être un petit peu romantique du début des années quatre-vingt, ce truc qu'avait les supporteurs français, d’aimer les perdants magnifiques, une formule qui a été utilisée dans certains reportages et donc quelque part, on a été des perdants magnifiques, mais perdants quand même.

Aujourd'hui, ça passerait moins. Parce que quand on est perdant, on n'est jamais a priori magnifique. Quand le premier but c'est d'être, c'est d'avoir, enfin, la victoire.

Mais on était une génération en plus avec Michel Hidalgo, où la victoire à tout prix ne nous intéressait pas. On n'allait pas casser trois joueurs en face pour gagner.

Alors, on manquait de maîtrise. On a vu pendant ce match quand on a mené trois, un, mais par contre voilà, on aimait bien gagner. On détestait la défaite, mais il fallait qu’aussi que ce soit lié à du beau jeu. Et donc c'est pour ça que ce match, on en parle en plus, il y a eu des rebondissements tout le temps.

L'histoire Battiston, Schumacher, l'arbitre encore une fois catastrophique, la remontée, la révolte, l'euphorie. Après, c'était pour moi, notamment, et pour bien d'autres, la descente aux enfers, la culpabilité. Donc, c'est pour ça que je parlais souvent d'une vie accélérée où on passe par tous les sentiments.

Il n'y a que ce genre de match qui nous permet de vivre des choses aussi intensément, du moins dans la vie professionnelle.

Le Podcast des Légendes: Tu parlais de Patrick Battiston, il est un joueur sur lequel tu avais des atomes crochus, vous vous entendez bien. Quand lui arrive cette agression de Schumacher, c'est quoi ta réaction toi ? Parce que tu es dans le match en plus donc. Comment et je pense qu'il n'y a pas de bonnes réactions.

Le Podcast des Légendes: Mais je voulais, je me demandais toujours comme on est dans un match de Coupe du monde avec autant d'intensité, et cetera, il y a un événement comme ça, extraordinaire. Comment toi tu vas la gérer personnellement ?

Maxime Bossis: On l’a géré d'une façon bizarre. Je me souviens très bien de cette action parce que je récupère le ballon justement pour le donner à Michel Platini qui lance Battiston dans l'axe et dans l'autre route. Donc je suis vraiment dans la bonne trajectoire, si l'on peut dire, pour voir la sortie de Schumacher. Et donc, je sais.

Mais la réaction, notre réaction générale et la mienne n'ont pas été à la hauteur du geste répréhensible du gardien allemand. Mais on sait que comme il n'en rajoute jamais, il se retrouve à terre. On sait, Schumacher a fait un attentat entre guillemets même si ce terme je n'aime pas trop l'utiliser et que Patrick risque gros sur le coup, donc on a vu arriver cette sortie.

Et ce coup de poing qui a failli être fatal pour Patrick Battiston. Donc on est tous retournés, mais on réagit bizarrement, on le voit partir en civière, on s'approche de lui, on sait qu'il va partir à l'hôpital, il a perdu plus ou moins connaissance, même plutôt plus que moi.

Et derrière après ça, l'ambiance du match n'a plus été la même, c'est devenu un peu plus violent, on a su réagir sur le terrain, mais c'était un peu compliqué derrière.

L'ambiance du match est…

Le Podcast des Légendes: Et si tu refais le match, est-ce que tu aurais une réaction différente après ça ?

Maxime Bossis: Oui, je pense que si je refaisais le match, j'en aurais voulu encore plus à l'arbitre sur le moment. On en a voulu, mais on a à peine parlementé, quelque part on était un peu estomaqué par ce qui s'était passé. Donc, ça ne nous est jamais arrivé qu'il y ait un geste comme ça en demi-finale de Coupe du monde.

Première Demi-finale évidemment pour nous donc. Enfin, s'il y avait un match à refaire. Les regrets, on peut en parler mille fois évidemment de cette action de Schumacher sur Battiston. Mais s'il y avait un match, des regrets, pardon à avoir, c'est la gestion, la mauvaise gestion qu'on a eue dans ce match fabuleux, quand on a mené trois, un. Et là, beaucoup d'équipes, les Allemands en premier, auraient balancé des ballons dans les tribunes.

Auraient commencé ou continuaient à mettre des coups, auraient déjoué totalement pour gagner du temps. Nous, on n'a pas su. Voilà, on n'a pas su et c'est ce qui nous a manqué, ce qu'on a réussi à avoir quatre-vingt-quatre deux ans après, on n'a pas su garder un résultat et garder cette marge de sécurité importante, deux buts d'avance.

Mais si les allemands, ils sont capables à chaque match, du moins à l'époque, de revenir sur leurs adversaires, on n'a pas su garder ces deux buts d'avance. On a continué à jouer, on a perdu le ballon un peu plus vite, mais on a continué à jouer offensivement sans aller au bout. Enfin, on ne savait pas trop quoi faire. On a mal géré à mon avis.

Le Podcast des Légendes: Est-ce que tu penses que c'était un problème d'organisation ou un problème de culture, c’est-à-dire, il n'y avait pas de milieu de terrain défensif, Lopez rentre pour remplacer Battiston. Hidalgo lui dit de jouer derrière, Platini lui dit, non. Non, tu vas jouer au milieu. Qu'est-ce que tu penses à ce niveau-là plutôt culturel, plutôt tactique, plutôt joueur ?

Maxime Bossis: C'est un problème, les deux sont de vrais problèmes de culture, on ne savait pas forcément encore cadenasser un match et également de problèmes d'organisation évidemment. Surtout qu'à l'époque il y avait seulement seize joueurs. Il y avait six jours dans les tribunes qui ne pouvaient pas rentrer sur le terrain.

Le Podcast des Légendes: Il y a Gérard, il y a Larios.

On était vingt-deux pour une coupe du monde, mais donc, voilà. Gérard dans les tribunes, Jean-François.

Et donc avec les blessures des milieux de terrain, de Bernard il me semble, si mes souvenirs sont bons, il n’y a plus de milieu de terrain pour rembourser donc, pour les remplacer pardon. Donc il y a eu un problème également d'organisation et c’était également une erreur supplémentaire, ouais.

Le Podcast des Légendes: Les premiers souvenirs qui te reviennent, alors on parlera bien sûr du penalty si tu nous le permets, mais les premiers souvenirs qui te reviennent quand tu penses à Séville c'est quoi ? C’est Battiston ? C'est le troisième but, c'est ?

Maxime Bossis: Le souvenir, c'est tout un souvenir global de deux heures d'une vie comme je l'ai dit en accéléré avec le match certainement le plus fort qu'on ait fait dans notre carrière, y compris même pour Michel Platini avec qui je parlais souvent de ce match. Mais pour lui, c'est le match le plus marquant.

Pourtant il en a connu pas mal dans sa carrière, donc c'est un souvenir global unique, mais on se rend compte après, on se rend compte après de l'importance de vivre ce genre de choses, c'est le plus grand souvenir, le plus joyeux à certains moments, mais également le plus douloureux évidemment collectivement et aussi le plus douloureux individuellement, me concernant.

Le Podcast des Légendes: Toi, quand Giresse marque ce troisième but, il y avait une partie de l'équipe qui avait dit dans les nombreux articles et interviews que pour eux, ils s’imaginaient déjà en finale. Toi qui es défenseur, qui as vécu des matchs serrés, qui connais le football allemand, est-ce que tu penses que c'est gagné ou est-ce que tu continues à, tu essayes un petit peu de tempérer les ardeurs du reste de l'équipe qui veut continuer à attaquer, marquer éventuellement un quatrième but.

Maxime Bossis: On n'avait pas forcément les forces, l'objectivité pour parler entre nous. Mais par contre moi comme défenseur, en effet, je pense que ce n’est pas gagné. Et quand je vois rentrer Rummenigge, ça me conforte dans l'idée que rien n'est gagné encore. Et peut-être aussi que ce score de trois est trop beau pour être vrai.

On se demande même comment on fait pour avoir deux buts d'avance sur l'équipe d'Allemagne, donc on n'arrive pas à tout maîtriser. Alors peut-être que les attaquants pensent que c'est gagné, mais quand on est près du danger, près du gardien et quand on est défenseur, on sait très bien que tout peut changer d'une minute à l'autre. Et c'est malheureusement ce qui s'est passé.

Le Podcast des Légendes: On va revenir peut-être justement à un épisode personnel un peu douloureux donc, mais qui fait partie du football, qui est effectivement la séance de penaltys. Et la première question qu'on avait avec Michel c'était, mais comment tu te retrouves sélectionné pour être ce tireur et comment se fait la sélection des tireurs ?

Je ne suis pas sélectionné pour être dans les cinq premiers tireurs. Je ne fais pas partie des cinq premiers, j'en avais tiré des penaltys, deux ou trois avec Nantes, j’avais marqué deux sur trois et en stage je tirais souvent plutôt avec réussite, mais les cinq tireurs se sont autodésignés plus ou moins et moi je n'étais pas dans les cinq.

Je tire le penalty uniquement parce qu'il y a égalité et quand il y a égalité il faut évidemment un autre tireur, et comme à ce moment-là tout le monde prend la poudre d'escampette, bon. Et je sens que, je sais que Jean Tigana s'en va, que Marius a déjà enlevé ses protège-tibias et ses chaussures et il n'a pas envie, que Christian Lopez n'a pas envie non plus.

Donc je sais, je me dis bon, j'ai vingt-sept ans, ça fait.

Le Podcast des Légendes: Christian Lopez a été après toi apparemment, il aurait été septième d’après ce qu’il racontait.

Oui il aurait peut-être tiré après, mais quelque part moi c'était bien qu'il non, peut-être bien qu'il soit avant d'ailleurs. Et donc, je me dis bon.

Le Podcast des Légendes: Il nous a dit l’inverse. Il a dit qu’il était content que ce soit toi avant lui.

Maxime Bossis: Ouais, je me doute, je me doute qu'il était content que ce soit moi.

Le Podcast des Légendes: Il nous a expliqué qu'il avait raté son penalty justement contre le PSG en finale de Coupe de France juste avant et qu'il n'avait pas envie que ça recommence.

Maxime Bossis: Il n'était pas dans les mêmes dispositions et les bonnes dispositions, oui. Mais j'y vais donc parce que je sens que c'est aussi mon devoir, entre guillemets, de prendre cette responsabilité. Parce qu’après trente, quarante sélections, donc je ne m'imagine pas pardon de ne pas le faire.

Même psychologiquement, on n'est pas préparé, donc quand je pars du milieu de terrain je ne sais pas du tout ce que je vais faire en plus, c'est ça le problème. C’est qu’on décide, je décide, je ne suis pas dans les cinq premiers tireurs et je me dis, quand même, il n'y aura pas égalité et donc ça arrive. Et là, je me dis, qu'est-ce qu'il faut faire ?

Tirer à droite, à gauche, mettre une bombe au milieu ? Et donc, jusqu'au dernier moment, du moins vingt secondes avant de frapper ce ballon, je ne sais pas trop. En plus, avec la fatigue, tout ce qu'on a vécu avant, on part du milieu de terrain jusqu'à ce point de penalty, ça paraît une éternité, c'est trente, quarante secondes qui passent, ça paraît très, très long, en plus Schumacher, malgré ce qu'il avait fait à Battiston est quand même un très bon gardien.

Et on ne se parle pas non plus parce qu’on m'a dit après, mais Schumacher il est toujours partie du côté droit, mais j'ai dit, mais moi, personne ne me l'a dit, à ce moment-là, je vais essayer de le mettre de l'autre côté et donc à l'arrivée, donc je veux trop l'assurer et je le tire plutôt mal, Schumacher part du bon côté et donc les regrets sont éternels derrière, évidemment.

Le Podcast des Légendes: Mais alors, pendant, quand tu fais cette marche épuisante et horrible psychologiquement, du rond central au point de penalty, tu te dis, tu ne sais toujours pas où tu vas tirer ?

Maxime Bossis: Je le sais à la fin de la marche, on va dire à la fin de la marche, je le sais, mais je me décide. Oui, vingt secondes avant, oui.

Le Podcast des Légendes: D'accord.

Maxime Bossis: Avant de poser le ballon, juste avant de poser le ballon. Je me dis bon, je vais essayer d'assurer le coup sur sa droite, ne pas prendre de risques techniquement alors que bon, je crois qu'il a dit depuis que bon je, quand il m'a vu arriver en disant c'est un défenseur, il n'est pas capable de mettre un intérieur du pied de l'autre côté.

Si c'est un attaquant, je ne serais peut-être pas partie pareil. Sauf que bon, à ce niveau-là, même un défenseur a priori techniquement, est quand même capable de marquer un plat de pied de l'autre côté, donc. Donc bon, il va souvent à l’intox, mais je me décide un peu tard, mais je sais que c'était difficile. Alors après bon, ce qui n’est pas rassurant du tout.

Mais on sait que dans les années qui ont suivi, dans les années précédentes, beaucoup de joueurs ont raté des penaltys et des tirs au but et pas des moindres. Mais ça ne me consomme pas totalement.

Le Podcast des Légendes: Et pour te rassurer, on a interrogé récemment Alain Giresse qui nous expliquait son propre penalty. Il n’avait pas l'air hyper rassurer lui-même quand il l’a tiré et il était dans les mêmes dispositions psychologiques que ce que tu viens de décrire.

Maxime Bossis: Et pourtant Gigi, il en tirait beaucoup avec Bordeaux, un petit peu en équipe de France, un peu moins parce qu'il y avait Michel Platini, mais quand, on le voyant de l'extérieur, voilà on parlait tout à l'heure d'avoir le trac, pas le trac, certains pensaient que je n'avais jamais le trac, là, c'est pareil, quand je vois tiré Alain, je pense qu'il est capable de le mettre.

Et quand, il le met très bien d'ailleurs, plat du pied. Et je me dis, il n'a pas eu peur. Sauf qu’en définitive, il te dit qu'il avait eu peur aussi.

Le Podcast des Légendes: Oui.

Maxime Bossis: On ne tire pas un penalty de Coupe du monde sans avoir la trouille.

Le Podcast des Légendes: Il nous explique notamment c'est qu’il a tellement de trac qu’il ne regarde pas Schumacher et donc avant de le tirer, il se retourne pour ne pas le regarder.

Le Podcast des Légendes: Ouais, il lui tourne le dos.

Maxime Bossis: Oui, c'est ce qu'on fait souvent. Voilà, je ne sais pas si j'ai fait. J'ai fait un petit peu, mais peut-être pas assez suffisamment. On se retourne pour essayer de ne pas regarder le gardien. C'est un exercice qui paraît facile. Moi, j'ai tiré cent penaltys ou cinquante dans mon petit club, il n'y avait pas la même importance et les gardiens en face étaient loin d'être aussi bon.

Et donc dans ce grand but, à dix mètres des buts, on peut dire c'est inratable un penalty, et bien si, c'est super compliqué psychologiquement, mais ce n’est pas si simple et en plus le gardien a un avantage psychologique. S'il l’arrête, c'est un exploit et s'il ne l'arrête pas, et bien ce n'est pas non plus une erreur. Psychologiquement, il a quand même cet avantage-là.

Le Podcast des Légendes: Donc on va revenir, on revient à Séville. Je rappelle pour nos auditeurs que c'est la première séance de penaltys en Coupe du monde de l'histoire. Il n’y en avait vraiment jamais eu avant. Donc, c'est quand même difficile de préparer ça, je ne sais même pas si Hidalgo avait évoqué la possibilité que ça se termine aux penaltys.

Le Podcast des Légendes: Est-ce que vous en discutiez à l'époque ?

Maxime Bossis: Je pense que oui. La veille du match, il y avait déjà des tireurs qui avaient été, qui s'étaient désignés, des volontaires, en accord avec Michel Hidalgo, je n’en suis pas sûre. Il faudra demander aux intéressés, ceux qui ont tiré dans les cinq premiers. Mais je pense que oui, quand même, même s'il peut y avoir toujours des changements au dernier moment. Mais je pense que oui.

Le Podcast des Légendes: Effectivement, tu dis ça maintenant, je me souviens que Didier Six nous disait qu’à l'entraînement, il mettait des patates dans la lucarne. Il se pose encore, je pense, tous les jours la question, pourquoi il n'a pas fait pareil lors de son penalty, lors du quatrième penalty où il tire au ras de terre contre Schumacher.

Maxime Bossis: Oui, il fait un peu la même erreur que moi j'ai faite quelques minutes après. C'est-à-dire que, et pourtant Didier, il a une technique très sûre. Il assure un peu le, il assure un peu son pied gauche alors qu'il pouvait mettre, ouais, une patate dans la lucarne opposée. Sauf que peut-être qu’avec la peur, on ne tente pas un geste technique trop dangereux.

Mettre une frappe de balle de cent kilomètres par heure, tout le monde peut le faire. Sauf ça peut partir dans les tribunes aussi. Donc si on la rate, les gens vont dire, mais pourquoi il ne l'a pas placé alors qu'en le plaçant, on ne risque pas grand-chose sur le fait de placer la balle. Par contre, ce qu’on risque malheureusement, c'est que le gardien part du bon côté et qu'il ait le temps de plonger pour l'arrêter.

Donc on ne sait pas trop où mettre le curseur entre la prise de risque pour un penalty et au contraire le côté où on se dit, bon allez, on frappe le plus fort possible et puis on verra bien.

Pas évident.

Le Podcast des Légendes: Didier Six nous disait en plus que psychologiquement il a été chamboulé parce qu’il n'était pas prévu d'être le troisième, il était prévu d'être le quatrième tireur.

Le Podcast des Légendes: Et quand il passe, et quand on lui dit non, c'est à toi, il n'était pas, ou quatrième plutôt que cinquième, et quand on lui dit que c’est à lui en fait, il est, dans sa tête, mentalement il a perdu un peu de concentration et donc il perd ses repères qu'il avait préparés la veille.

Maxime Bossis: Oui, c'est ce qu'on m'a dit. Je n'ai pas parlé directement avec lui, mais ce que d'autres ont dit, c'est que normalement il était peut-être, prévu cinquième. Mais en définitive, on l’a fait tirer le quatrième et qu’il a dû perdre une partie de ses repères. Ça tient tellement à peu de choses un penalty raté ou réussi, mais tellement à peu de choses.

Pas seulement sur le geste technique, mais également et surtout psychiquement dans la préparation de ce tir.

Le Podcast des Légendes: Justement, par rapport à ce que tu disais sur le mettre en force ou tenter de le tirer près de la lucarne. On se souvient du penalty de Platini contre le Brésil justement quatre-vingt-six où il essaie de la mettre en lucarne et il rate le cadre, donc c'est tout à fait exact ce que tu disais. Donc fin du match, j'imagine que vous êtes tous.

Le Podcast des Légendes: Tout le monde pleure dans les vestiaires. Vous avez envie qu'une seule chose, c'est d'en finir, vous vous retrouvez à l'aéroport, l'avion a pris du retard, vous voyez l'arbitre qui discute avec les Allemands.

Maxime Bossis: Je sais.

Le Podcast des Légendes: Est-ce que tu penses encore à ça ?

Maxime Bossis: Et c'est là que ça.

Le Podcast des Légendes: Ouais.

Maxime Bossis: Ouais encore, on pense à ça et puis aussi ce sentiment d'injustice qui est un peu plus fort quand, bon, l’arbitre à trois heures du matin, à quatre heures du mat, de discuter et plaisanter avec les Allemands quand on sait très bien ce qu'a fait Schumacher sur Battiston donc on se dit bon, soit il est malhonnête, soit il est incompétent, soit, mais c'est vraiment un gros problème et on n'a qu'une hâte, c'est de rentrer le plus vite possible à l'hôtel même s’il n'y a aucune haine envers les joueurs allemands, ils ont fait leur match avec leurs qualités qu'on les connaît depuis tant d'années, mais c'est quand même un moment difficile à passer l'après match évidemment dans les vestiaires et puis ce retour, oui.

Le Podcast des Légendes: Toi, personnellement, qu'est-ce que tu en penses ? Est-ce tu penses que c’est de la malhonnêteté, est-ce que c'est de la maladresse, de la paresse de ne pas vouloir, enfin de ne pas vouloir sortir le carton rouge ?

Maxime Bossis: Je me pose la question.

Mais quand on a vu le Koweït avec un émir d'une telle puissance qui décide d'annuler un but qui était validé par l'arbitre, il n'y avait pas la VAR à ce moment-là donc le but était valide. L'arbitre n'avait pas le droit de revenir sur une décision et qu'on voit après une action où il devait y avoir penalty, expulsion, que tous les arbitres aujourd'hui ne sont pas tous formidables.

Il y en a de très bons, mais d'autres un peu, mais bon, auraient évidemment sifflé ça, on se dit, il y a ou beaucoup d'incompétence ou alors oui peut-être un peu de malhonnêteté, peut-être aussi qu'inconsciemment sans aller jusqu'à la malhonnêteté, il y a une protection, alors c'est courant dans la vie aussi des puissants et l'Allemagne était une équipe, une nation puissante footballistiquement, sportivement, et nous beaucoup moins, on arrivait un petit peu aux prémices d'un renouveau au niveau du football.

Mais il y a peut-être aussi un petit décalage par rapport à certaines décisions arbitrales. J'ai essayé de comprendre tout ça, mais il y a sûrement plusieurs réponses. Sûrement.

Le Podcast des Légendes: Pour revenir à l'arbitrage il y avait aussi, et c’est marrant on n'en parle plus trop, mais il y avait énormément de manœuvres pour que l'Espagne passe le second tour aussi, il y avait un penalty imaginaire sifflé lors de leur dernier match. Penalty raté que l'arbitre fait retirer sans raison particulière, le penalty est de nouveau raté par Lopez Ufarte, mais c'était quand même la coupe du monde de l'arbitrage scandaleux à la limite.

Maxime Bossis: Oui. C’est le pays organisateur donc peut-être que les arbitres ont un peu plus tendance à provoquer les petits coups de pouce pour ceux qui, c'est vrai que c'est, je pense qu'aujourd'hui alors on l'a vu, même en quatre-vingt-dix-huit où j'ai trouvé par exemple en aparté les discussions de Laurent Blanc assez sévère.

Mais ça ne plaisante plus quoi. Alors qu'à l'époque c'était un petit peu l'arbitrage comme on voulait avec peut-être une, les grands qui étaient plus ou moins privilégiés, c'est privilégier les organisateurs qui éventuellement s'ils étaient aussi une grande nation de foot ou pouvaient l'être.

Donc il n'y avait pas toujours de justice dans les décisions arbitrales, ce qui n'est plus le cas. Il peut y avoir parfois des erreurs qui sont en partie compensées avec la vidéo, mais pas de malhonnêteté et le sport avec aujourd'hui toutes les, tous les moyens qui sont mis à disposition des arbitres également, tous l'argent, la médiatisation, on a moins le droit à l'erreur aujourd'hui que les arbitres sont des professionnels, il faut qu'ils soient à la hauteur.

Le Podcast des Légendes: Pour revenir donc à cette fin de match en Allemagne, comment toi tu le vis personnellement le fait d'avoir manqué le dernier penalty ? Je suis désolé de revenir sur, mais est-ce que tu le, comment tu le vis ?

Maxime Bossis: Je le vis mal. Je le vis très, très mal évidemment parce que c'est pour ça que je, oui je sais. Je suis évidemment très triste de ce ratage, du moins du fait que le penalty soit arrêté parce que je ressens tout de suite un sentiment de culpabilité. Je ne pense même pas qu'avant j'ai fait, c’est après le recul que j'ai fait un bon match, je ne pense même pas qu'on aurait dû gagner ce match avant, que l'arbitre n'a pas été forcément honnête pendant ce match, qu’on gagnait trois, un, que si le match devait être perdu ou gagné.

On aurait pu le faire avant. Non, il y a un sentiment de culpabilité et la peur d'avoir déçu beaucoup de gens, y compris la famille proche. Je sais que mon épouse qui supporte quand même les contraintes du football depuis sept ou huit ans est en vacances avec ses parents. On avait loué sur la côte près de La Baule et donc, j'ai peur de décevoir.

Voilà, quelqu'un à qui je tiens plus que tout et qui a un petit peu aussi également parce qu'on n'en parle pas assez, tout arrêté pour me mettre dans les meilleures conditions d'une carrière, des enfants tôt, une carrière professionnelle, une vie sociale arrêtée pour être toujours présent pour les enfants et pour son mari.

Et donc je pense à elle tout de suite. Mais en même temps, je pense aux supporters, je pense au sélectionneur, je pense, à mes copains en disant, mais est-ce que je les ai trahis ou pas trahis ? Et en définitive, on ne trahit jamais personne, on ne trahit jamais personne dans ces moments-là parce que c'est trop dur, c'est trop dur et à partir du moment où on donne le meilleur de soi-même, y compris dans un tir au but, mais on n'est pas forcément à l'abri.

Pas forcément de ce sentiment de culpabilité qu'il a fallu du temps pour voilà, pour qu'il ne soit plus présent.

Le Podcast des Légendes: Comment tu as fait justement ?

Maxime Bossis: Si j'avais fait un match pourri, sincèrement je me serais senti coupable. Mais si j'avais fait un match pourri, peut-être que je ne serais pas allé le faire ce tir au but.

Voilà donc ouais, voilà. Mais c'est compliqué.

Le Podcast des Légendes: On aurait été éliminé avant. Si tu avais fait un match pourri.

Maxime Bossis: Oui.

Le Podcast des Légendes: On aurait été éliminé avant peut-être aussi.

Maxime Bossis: Ouais, peut-être. Et puis s'il y avait eu aussi la règle du but en or comme en quatre-vingt-dix-huit, ça ne tient à rien, mais on allait en finale puisqu'on a marqué les premiers après le temps réglementaire, donc ça ne tient à rien.

Le Podcast des Légendes: C’est ce que disait Didier Six aussi, ouais.

Le Podcast des Légendes: Et comment tu as réussi à surmonter cette amertume, cette blessure ?

Maxime Bossis: J'ai bien surmonté parce que je ne voulais pas rester sur cet échec-là et je savais que j'étais capable de surmonter ce tir au but en continuant ma carrière et en équipe de France si on voulait bien de moi et à Nantes. Et d'ailleurs, quand je suis revenu à Nantes, Suaudeau m’a quand même, je n'ai eu qu’une semaine de vacances seulement, ce qui est très peu.

Et Suaudeau m’a dit, mais je ne sais pas, je ne suis pas sûr. Est-ce que tu crois qu'il va être motivé avec ses mots à lui pour, avec tout ce que tu as vécu en Coupe du monde, sans me critiquer ou sans me dire que ça avait été bien ou pas bien. J'ai dit, ouais, ne t'inquiète pas. En plus c'est la première année je, il y a Henri Michel donc ouais, ça va aller.

En effet, on a été champions, on avait dix points d'avance sur Bordeaux et donc tout s'est bien passé. Sportivement, tout s'est bien passé, psychiquement aussi, même si je ne voulais plus jamais tirer de penalty. Donc j'ai pu rebondir quand même assez vite au niveau des matchs. Ouais.

Le Podcast des Légendes: D'accord.

Le Podcast des Légendes: Il y avait quand même une certaine bienveillance. Il y avait une certaine bienveillance du, enfin en tout cas de, j'en ai l'impression, dis-moi si je me trompe, il y avait quand même une certaine bienveillance du public français à ton égard ?

Maxime Bossis: Oui.

Le Podcast des Légendes: Il n'y avait pas de critiques ou quoi que ce soit, un peu de la même façon de, vis-à-vis Trezeguet quand il rate son penalty contre l'Italie en deux mille six, il n'y avait pas de critique, de toute façon, il n'aurait pas eu lieu d'être. Mais on a vu plus récemment que les joueurs, comme Tchouaméni n'avait pas hérité de cette même bienveillance par exemple.

Maxime Bossis: Ouais, c'est étonnant d'ailleurs, c'est assez injuste parce qu'il y a une bienveillance pour ceux qui ont une certaine image et moins pour d'autres que, qui en ont une autre peut-être qu'il en a beaucoup souffert. On en a parlé un peu, on n'a pas eu la même bienveillance, les supporters, certains supporters avec Didier Six qu'avec moi c'est vrai.

Le Podcast des Légendes: Exactement.

Maxime Bossis: Et donc, on a croisé la même chose au même moment, donc il faut avoir cette bienveillance-là, mais c'est vrai qu’on me sifflait rarement, même quand je, à part peut-être à Saint-Étienne, et encore. Donc il y avait une bienveillance globale du, quand on était avec Nantes. Et encore, il y a une bienveillance globale qui a perduré avec l'équipe de France et donc on m’a peut-être moins voulue pour ça, quoi.

Le Podcast des Légendes: Et pourquoi tu penses que Didier Six n'a pas eu cette même bienveillance, tu penses parce que c'était un globe-trotter, qu’il était peut-être, moins connu du public français ?

Maxime Bossis: Il était aussi connu Didier du public français, mais de par l'image qu'on projette auprès des gens, une image plus individualiste peut-être, alors que ce n'était pas forcément le cas non plus. Donc c'est assez compliqué entre l'image qu'on projette et celui qu'on est réellement, donc les gens, parfois ont de la bienveillance pour certains, et moins pour d'autres sans savoir, sans raison objective. Donc c'est assez compliqué.

Le Podcast des Légendes: C'est la fin de la deuxième partie de cet épisode du Podcast des Légendes consacré à Maxime Bossis. On se retrouve la semaine prochaine pour la troisième partie qui parlera, entre autres, de la Coupe du monde quatre-vingt-six. Merci à toutes et à tous de votre fidélité. On se retrouve la semaine prochaine.